Article publié le 5 juin 2024.
Deux mois après, où en est-on ? L’intersyndicale boycotte une « formation spécialisée » ce 4 juin
Le 4 avril, une violente agression verbale subie en public
Jeudi 4 avril, en début de matinée, suite à un problème de gestion de la file d’attente à l’entrée de la Direction générale à Montrouge, un agent encadrant des services logistiques a subi de la part de la Secrétaire générale une agression verbale devant une trentaine de personnes, ponctuée d’un « Tu es viré » clairement prononcé. Plusieurs agents qui ont assisté à cet évènement ont contacté nos organisations syndicales et se sont dits choqués. Pour le cadre de la DG qui a subi ces mots, le choc a été plus violent encore : après plus de 40 ans de services et de compétences reconnues, à 4 mois de son départ à la retraite qu’il pensait pouvoir célébrer comme il se doit avec ses collègues, il est demeuré sans voix, le souffle coupé. Il a le sentiment d’avoir toujours bien fait son travail ce que confirment ses notations et d’avoir été, autant que possible, attentif aux agents qu’il a encadrés.
Depuis cette agression, arrêté par son médecin, il n’a pas repris le travail. Il n’a reçu aucune excuse de la part de l’administration. Plusieurs représentants du personnel l’ont contacté et l’ont soutenu dans cette épreuve, ainsi que de nombreuses personnes qui le connaissent, collègues ou agents ayant travaillé avec lui. Cela n’a pas effacé le traumatisme subi même si la sympathie manifestée l’aide à tenir le coup.
Une enquête demandée par les 5 principales organisations syndicales
Elles-mêmes surprises quand elles ont eu connaissance de l’événement du 4 avril, nos organisations syndicales ont pris les précautions qui s’imposaient : nous avons écouté et recueilli les témoignages qui nous sont parvenus, souvent par écrit, pris le temps de vérifier leur cohérence et leur concordance. Nous avons également contacté notre collègue agressé et l’accompagnons dans la durée.
Puis, nous avons adressé le 24 avril un courriel au Directeur général en lui demandant un entretien. Celui-ci a répondu, quelques jours plus tard, le 30 avril, par la négative.
Le 7 mai, l’intersyndicale a donc demandé au Directeur général une enquête en lien avec la Formation spécialisée santé, sécurité et conditions de travail de réseau (FS SSCT), pour que toute la clarté qui s’impose soit faite sur cet événement, sans que les témoins n’aient à craindre de représailles.
Le 14 mai, l’intersyndicale n’avait toujours pas reçu de réponse à cette demande d’enquête. En revanche, elle a été destinataire de nombreux témoignages (une quinzaine aujourd’hui), sur un champ plus large que le seul événement du 4 avril, dénonçant des attitudes, des paroles, parfois des méthodes de management perçues comme agressives à l’œuvre au sein du secrétariat général de l’Insee depuis de nombreux mois, voire des années.
Tract et boycott du dialogue social : les syndicats ont-ils le choix ?
En l’absence de réponse du DG, l’intersyndicale CGT - CFDT - CFE-CGC - Sud - FO a décidé de diffuser le 14 mai un tract à l’ensemble des agents de l’Institut, pour que le sujet ne soit pas enterré.
L’intersyndicale a également annoncé que les 5 organisations syndicales qui la composent, totalisant 10 sièges sur 11 au CSA de réseau de l’Insee, ne participeront plus au dialogue social national tant qu’elles n’auront pas reçu de réponse positive à leur demande d’enquête. Le Comité social d’administration du 21 mai a donc été boycotté, de même que la FS SSCT programmée le jour où nous diffusons ce tract, le 4 juin.
Nous rappelons que la représentation syndicale à l’Insee s’appuie sur une participation nettement plus élevée qu’en moyenne dans la Fonction publique d’État (66 % contre 45 %), ce qui devrait asseoir fortement sa légitimité aux yeux de l’autorité administrative, sauf à jouer un jeu dangereux avec la démocratie sociale.
Nous n’avons pas le choix. Notre démarche est une évidence, un devoir devant le nombre et la force des témoignages qui nous sont adressés, par des observateurs ou des personnes directement et profondément blessées. Ne rien dire et passer à la suite serait inacceptable et ne serait pas à la hauteur du mandat qui a été confié aux élus. Les agents de l’Insee qui souhaitent que nous défendions leurs intérêts, nous accorderaient-ils encore du crédit si nous laissions ce sujet sans suite ?
La question de l’exemplarité se pose aussi : ne rien faire ou ne rien dire ne reviendrait-il pas à permettre aux agents de « crier » ou de « hurler » (termes lus et entendus) sur d’autres agents, notamment en situation de subordination hiérarchique ? Si cela est possible en public, quelle limite en bilatéral, sans témoin ? Faut-il autoriser des menaces, ponctuelles ou répétées telles que « Tu es viré » ? Quel sens auraient à l’avenir les Commissions de discipline qui sanctionnent des agents en regard d’actes parfois moins répréhensibles ?
Quelle issue possible ?
La situation est aujourd’hui bloquée. Le Directeur général a répondu le 17 mai qu’il refusait une enquête, même s’il accepte désormais de recevoir les organisations syndicales selon des modalités à préciser. L’intersyndicale CGT - CFDT - CFE-CGC - Sud - FO a indiqué le 28 mai qu’elle demandait une convocation exceptionnelle de la Formation spécialisée de réseau en formation plénière pour traiter le sujet de l’agression du 4 avril.
Quelle qu’ait été l’intention de la Secrétaire générale, le propos tenu a été violent et a heurté un agent, dont le médecin a jugé que son état ne lui permettait plus de travailler, et les nombreux témoins de cet évènement.
Après plus d’un mois d’échanges inaboutis, nous demandons un acte de reconnaissance fort et officiel. Des excuses qui seraient formulées aujourd’hui, sous la pression grandissante des actions syndicales, deux mois après l’évènement, ne peuvent plus suffire.
Nous demandons aujourd’hui un geste concret de la Direction de l’Insee pour que cessent toutes les agressions verbales, dénigrements, menaces ou intimidations, qu’elles soient publiques ou effectuées dans la relative discrétion d’un bureau, notamment au sein du secrétariat général. Concrètement, nous redemandons la tenue d’une enquête de la FS dans le cadre prévu par les textes : la direction ne doit pas s’y soustraire.
Nous agissons pour que l’Institut ne soit pas un jour pointé du doigt comme un endroit où l’on maltraite les agents publics.
Pour compléter les témoignages déjà reçus, nous invitons les agents, de tous niveaux, ayant subi des comportements brutaux, pressions, agressions verbales, paroles humiliantes, menaces,...à entrer en contact avec nous afin que nous collections ces agissements ayant cours dans cette plus haute sphère du secrétariat général de l’Insee. Nous garantissons l’anonymat des personnes qui se feront connaître.
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